L . Leclerc

PROLOGUE

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          Ils étaient cinq sur la paillasse que tout le monde regardait. C’est de là que provenait la musique qui avait brisé le silence du cours. Le professeur les fusillait du regard pendant que chacun réagissait à sa manière. Louise n’osait relever la tête de son bouquin. Elle était très gênée. Pourquoi fallait-il toujours que ses meilleurs amis fassent une gaffe ? Quand ils ne dormaient pas, ils parlaient et riaient trop fort. Cette foisci, pour une fois qu’elle les trouvait fort disciplinés, il s’était avéré qu’ils étaient sur leurs smartphones à s’envoyer les dernières musiques du moment. Angelica, à côté d’elle, releva la tête de son magazine de mode et sourit à l’assemblée n’ayant pas prêté attention à ce qui se passait autour d’elle. Elle ne voyait pas pourquoi tout le monde les regardait comme ça. Quand elle aperçut le regard du professeur d’histoire, elle ramena son bouquin vers elle pour qu’il ne voie pas le magazine posé dessus. À son côté, Marc, l’un des deux joueurs de football américain de la bande et le plus costaud des garçons. Il avait réussi à planquer son GSM dans la poche de sa veste sans manches avant que le prof ne se retourne. Alors que David Guetta résonnait encore dans la pièce et que son meilleur ami tentait d’éteindre son téléphone, lui, ne pouvait s’empêcher de rire. Il finit par se cacher dans ses mains, les larmes aux yeux, pour reprendre son sérieux. Édouard, que tout le monde surnommait Eddy, était le responsable de ce raffut. Il avait beau sourire au prof, il n’était pas à son aise. D’autant plus qu’il ne parvenait pas à éteindre cette stupide machine. Il finit par enlever la batterie et la musique se tut. Il passa une main dans ses cheveux, l’air gêné et s’excusa auprès du professeur. Ce dernier n’étant pas convaincu, l’invita à rester après le cours.

— Qui va rater son entraînement de volley ? lança le dernier de la bande.

Jess, le deuxième joueur de foot, un peu plus petit que les autres mais pas pour autant moins populaire. Toutes les filles couraient après lui, elles le surnommaient « le mystérieux Jess ». Pourtant, il n’était pas le plus riche de la bande, il vivait dans une grande ferme juste à côté de chez Louise à l’extérieur de la ville et avait toujours de bonnes notes. Cependant, il savait se montrer beaucoup plus discret que les deux autres.

— C’est Eddy ! lui répondit Marc, hilare.

L’intéressé lança les parties de son téléphone dans son sac et prit son livre d’histoire.

— C’est de votre faute… grommela-t-il.

— Vous feriez mieux d’écouter ! dit Louise entre deux prises de notes.

— Elle a raison, renchérit Angelica.

— Tu peux bien parler, tu regardes les nouvelles tendances pour cet été… lui rappela Jess avachi sur la chaise en train de regarder le prof donner son cours.

— Non, pas du tout ! rétorqua-t-elle en montrant le livre dont dépassait la couverture du magazine.

Il leva les yeux au ciel. Il avait toujours apprécié Angelica. Elle était très belle mais pas toujours très maligne, heureusement qu’elle avait un bon sens de l’humour. Il étendit ses jambes sous le banc. Il lui semblait que ce cours durait depuis des heures. Heureusement qu’il y avait toujours quelqu’un dans la bande pour mettre un peu d’animation à la moitié de la leçon.

Ils étaient toujours ensemble, inséparables comme les cinq doigts de la main. Tout le monde pensait qu’il n’y avait aucune dispute et aucun secret entre eux… Et c’est vrai, il n’y en avait pas, du moins pas des énormes, sauf pour Jess… Jess, lui, avait un énorme secret.

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CHAPITRE 1

 

       Ils attendirent tous Eddy à la sortie du cours qui se faisait réprimander par le prof à l’intérieur.

— Quand même, avoir cours d’histoire dans la classe de chimie ce n’était pas le top… commenta Angelica en brossant ses longs cheveux bruns.

Elle avait le teint bronzé et elle était toujours habillée, coiffée et maquillée à la perfection.

— Surtout qu’il n’y a pas de tablette sous le banc pour planquer les téléphones… renchérit Marc.

Louise regarda sa montre avec anxiété. Si Eddy ne se dépêchait pas, ils allaient être en retard à l’entraînement de volley. Le coach d’Eddy avait été très clair, ceux qui ne sont pas à l’heure ne rentrent pas et elle n’avait aucune envie de faire ses devoirs à l’extérieur, il faisait encore trop froid. Son entraînement, à elle, suivait celui d’Eddy. Heureusement pour elle, elle n’avait pas été obligée de porter son sac de sport de toute la journée car Jess l’avait mis dans son casier, celui-ci étant toujours vide. Le sien débordait de cahiers, de notes et de trucs sans importance qu’elle ne prenait pas le temps de jeter.

— Il va se dépêcher ? se plaignit-elle.

Jess, qui était dans ses pensées, releva la tête. Il regarda Louise. Ses longs cheveux châtain clair bouclés étaient relevés en une queue-de cheval. Elle pinçait toujours ses lèvres quand elle était anxieuse, il la connaissait par cœur. Aujourd’hui, il ne pouvait pas l’accompagner à son entraînement, faire ses devoirs avec elle et la raccompagner jusque chez elle. Il partait en week-end camping comme à chaque pleine lune avec ses parents.

— Viens, lui dit-il, on va chercher ton sac.
Elle sourit et l’accompagna. Elle serrait sa farde contre elle et marchait tête baissée. Elle devait sûrement penser à quelque chose, il aurait bien voulu savoir mais il ne lui demanda rien. Il n’avait pas besoin de le faire.

— Tu pars toujours en week-end quand j’ai match à domicile… se plaignit-elle. Tu m’as dit que tu viendrais me voir une fois…

— Je sais, je ne le fais pas exprès, je te le promets… C’est quand le prochain ? demanda-t-il en déverrouillant son casier qu’ils venaient d’atteindre.

— Dans trois semaines, en plein milieu de l’après-midi. répondit-elle en s’appuyant contre le mur.

— Je viendrai, c’est promis.

Elle lui sourit et le remercia. Il aimait la voir sourire. Il n’était pas très doué en relation humaine mais, de temps en temps, il marquait des points. Il prit le sac de Louise pour ne pas l’encombrer et ils rejoignirent les autres. Eddy était enfin sorti de la classe.

— Il m’a mis une heure de colle, heureusement j’ai réussi à la négocier pour qu’il ne me la mette pas un jour d’entraînement, expliqua-t-il.

— Super, en avant alors, parce qu’on va être en retard ! le réprimanda Louise.

Elle fit la bise à Angelica et Jess.

— Désolé de ne pas pouvoir t’accompagner… murmura celui-ci.

— Ce n’est pas grave, amuse-toi bien en camping. Tu peux juste déposer ma farde à la maison ?

— Bien sûr ! acquiesça-t-il en souriant.

Ils échangèrent la farde pour le sac et elle rejoignit les deux autres garçons. Jess la regarda partir sans un mot. Quand ils eurent passé le coin du couloir, on n’entendait plus que les rires bruyants de Marc. Jess se retourna alors sur Angelica qui était toujours là et le regardait amusée. Il l’accompagna jusqu’à la porte principale du lycée. Elle était sur son téléphone quand elle lui dit :

— Pourquoi tu ne lui dis pas ?

— Pardon ?

— Pourquoi tu ne dis pas à Louise que tu l’aimes bien… répéta-telle en souriant.
— Ne dis pas n’importe quoi, c’est mon amie, tout comme toi… répondit-il en essayant d’être le plus blasé possible.

— Bien sûr, tu la regardes comme si c’était le dernier vernis à la mode.

Jess la regarda et arqua un sourcil. La comparaison n’était pas vraiment éloquente. Elle leva les yeux au ciel.

— Tu m’as comprise, en plus tu l’accompagnes partout.

— Rien à voir, je vous accompagne toujours partout. Je n’y peux rien si tu es allergique aux salles de sport… se défendit Jess en souriant.

La Mercedes d’Angelica patientait près du trottoir. Son majordome devait en avoir marre d’attendre car il pianotait sur le volant comme un fou.

— C’est vrai mais je reste persuadée que tu l’aimes bien. Cependant, je ne comprends toujours pas pourquoi Louise adore tant frapper dans un ballon…

— Ça la défoule ! expliqua Jess.

— Qu’elle vienne faire du Piloxing avec moi… Ça défoule tout aussi bien et tu n’as pas besoin de te jeter à terre et d’avoir plein de bleus…

Jess sourit et ouvrit la portière à Angelica qui lança ses affaires sur la banquette arrière.

— Tu lui proposeras, dit-il.

— Je vais le faire tout de suite, et je vais lui dire que tu craques pour elle, aussi ! s’exclama-t-elle en sortant son portable et en s’asseyant dans la voiture.

— Bien sûr, c’est n’importe quoi Angie ! rit-il. Bon week-end.

— Oui, oui… À lundi, l’homme des bois ! lança-t-elle en fermant la portière.

La voiture démarra sans attendre et s’engagea dans la rue quelques minutes plus tard. Jess prit le sens inverse et rentra seul.
       Louise entendait Marc hurler sur le terrain extérieur alors qu’elle était à l’intérieur du bâtiment. Elle se pencha sur la fenêtre et le vit en train d’agiter les bras pour avoir le ballon. Pendant ce temps, le coach faisait faire des pompes à Eddy pour être arrivé deux minutes en retard. Louise, elle, planquée au-dessus des gradins, essayait de se concentrer pour faire son devoir de maths quand elle reçut un message d’Angelica.
« Viens avec moi au Piloxing, tu auras de plus belles jambes pour le bal du lycée ! P.S. : je te le dis encore, Jess a craqué sur toi. »

Louise rit, depuis le temps qu’Angelica se faisait des films sur Jess et elle. De plus, elle n’avait jamais compris la passion de Louise pour le volley. Surtout quand elle voyait les bleus aux genoux que cette dernière se faisait. Elle remit son téléphone dans sa poche. Elle lui répondrait plus tard. Maintenant, elle devait bosser.